La Cuisine est un Art

Lorsque l’on parle d’art, on cite toujours un écrivain, un musicien ou un peintre dont la mission est de créer un univers illusoire, un paradis artificiel pour nous consoler d’une réalité qui serait absurde. La mission d’un cuisinier est tout autre : en créant un univers qui n’a rien d’illusoire, un paradis qui n’a rien d’artificiel, il nous rapproche d’un Dieu dont je ne sais si tel ou tel chef y croit mais dont je suis certain qu’ils ne le rejettent pas. Et si un grand repas c’est du rêve, de l’illusion et des idées, c’est aussi l’univers des choses les plus simples auxquelles le génie du chef ajoute celui des choses invisibles. Certains cuisiniers nous donnent accès à cette réalité, ils nous la font percevoir dans son évidence concrète parce qu’ils sont, tout simplement des artistes.

Bernard Carrère.


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29 septembre 2014

L'édito de Bernard - L'inversion de la courbe du fromage…

Ce n'est pas en Hollande, l'autre pays du fromage, que l'inversion de la courbe de ce mets de choix a été découverte. C'est en France ! Et pour être précis, au Pays Basque où un berger a eu l'idée d'ajouter à sa production de fromage de brebis de forme cylindrique un fromage en forme de brique. 
Un de nos plus brillants - crânement parlant - ministres, partisan d’une joyeusement démagogique « inversion de la courbe du chômage » nous conte avec une déconcertante aisance que celle-ci est en bonne voie. Je suis toujours surpris que ceux qui prétendent nous gouverner emploient de gauche à droite des formules qui ne veulent pas dire grand chose. Lorsque nos grands penseurs de tous bords et intellectuels de toutes tendances sauront faire comprendre aux grands responsables de l'État, des Syndicats et autres forces plus ou moins vives de la nation qu'il serait temps d'abandonner un vocabulaire abscons leur permettant une retraite à couvert, à ce moment là, et seulement à ce moment là, un grand pas aura été fait vers « l'inversion de la courbe du chômage » dont l'envie est aussi louable que le terme est impropre, l'infléchir me semblant plus approprié.

Côté courbe, celle de la brioche me semble également d'actualité. A voir le physique actuel d'anciens sportifs et autres athlètes de haut niveau sortis du formol pour accompagner sur quelques mètres une flamme olympique régulièrement éteinte, j’en suis venu à penser que l'absence d'un simple "p" peut transformer leur monde : c’est le sport qui les a élevés et l'ironie du sort qui leur a offert une brioche digne des "Religieuses" qui ont fait le bonheur de mes déjeuners dominicaux. 
Tout le monde connaît les courbes rondelettes des deux choux recouverts de fondant et de touches de crème au beurre rappelant la silhouette des religieuses du temps jadis. Qu'il le veuille ou non, le pâtissier qui tentera d'inverser la courbe d'une "Religieuse" ne parviendra jamais à faire un "Pet de nonne" aussi rondouillard que celui que l'on doit à une novice de l'Abbaye de Marmoutier. Alors que tout le couvent s'affairait autour des fourneaux pour la préparation d'un repas au cours duquel l'archevêque de Tours devait bénir une relique du manteau de Saint-Martin, « un bruit étrange et sonore, rythmé, prolongé, semblable à un gémissement d'orgue qui s'éteint, puis aux plaintes mourantes de la brise qui soupire dans les cloîtres, vient frapper de stupeur l'oreille indignée des bonnes sœurs. » Sœur Agnès, l'auteur de ce bruit, aurait alors chancelé en laissant tomber une cuillerée de pâte à chou dans une marmite de graisse chaude : le "Pet de nonne" était créé ! Un pâtissier de mes amis m'a juré sur ses plus beaux "Puits d'Amour" qu'une "Religieuse" du nom de "Madeleine" serait alors partie comme "l'Éclair" sur la route de "Paris-Brest" !  

Si l'envie venait à un pâtissier d'inverser la courbe du "Paris-Brest", gâteau inspiré par la course cycliste créée en 1891, celui-ci perdrait sa forme de roue de bicyclette et n'aurait aucun sens. Ce serait du gâchis ! Quoique ? Lorsqu’un artisan-boulanger vendéen eut l'idée d'inverser la courbe de ses brioches, cela a donné la "Gâche", brioche vendéenne en forme de pain nullement gâchée. Quant à la "Madeleine", elle est l’invention de Sœur Madeleine, nonnette du moyen-âge ayant choisi d'inverser la courbe de la brioche originelle en moulant sa pâte dans les coquilles Saint-Jacques que portaient les pèlerins en route vers Compostelle. 

Rédigée à grand renfort de réflexion des communicants de l'élysée, largement commentée et reprise par tous les grands médias la formule « inversion de la courbe », m'a permis de réfléchir à une éventuelle inversion de la courbe de ma brioche, synonyme concret de perte de poids, expression plus claire et plus courte ne nécessitant aucun commentaire de mathématiciens pédants, mais avec un sous-entendu clairement fallacieux, un phénomène forcément continu une fois amorcé, la diminution de mon tour de taille.


Bernard Carrère

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