La Cuisine est un Art

Lorsque l’on parle d’art, on cite toujours un écrivain, un musicien ou un peintre dont la mission est de créer un univers illusoire, un paradis artificiel pour nous consoler d’une réalité qui serait absurde. La mission d’un cuisinier est tout autre : en créant un univers qui n’a rien d’illusoire, un paradis qui n’a rien d’artificiel, il nous rapproche d’un Dieu dont je ne sais si tel ou tel chef y croit mais dont je suis certain qu’ils ne le rejettent pas. Et si un grand repas c’est du rêve, de l’illusion et des idées, c’est aussi l’univers des choses les plus simples auxquelles le génie du chef ajoute celui des choses invisibles. Certains cuisiniers nous donnent accès à cette réalité, ils nous la font percevoir dans son évidence concrète parce qu’ils sont, tout simplement des artistes.

Bernard Carrère.


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08 novembre 2011

Heureux qui, comme un bœuf en Chalosse…

On connaît la Chalosse pour son bœuf et ses coteaux : câlinée par l’Adour qui la serre dans ses bras, elle tutoie au Sud les Pyrénées devenues Atlantiques et chatouille au Nord les faubourgs de Mont-de-Marsan…

Dans ses prairies entrecoupées de maïs et de vignes s’ébattent de beaux bœufs à la robe froment : les plus vifs - de couleur, s’entend - sont de race limousine, les plus clairs - tirant sur le crème - appartiennent à la famille des Blondes d’Aquitaine.
Chalosse n’est pas une race : c’est un terroir sur lequel se perpétue un ancestral savoir-faire - désormais détaillé dans un cahier des charges drastique - sans lequel un steak d’ici ne serait qu’un steak…
L’appellation se mérite : n’est pas Chalosse qui veut ! Trois races sont éligibles (Limousine, Blonde d’Aquitaine et Bazadaise) mais la pauvre Bazadaise ne représente pas 1% de la production : cette mal-aimée - trop petite, trop râblée - est la préférée de Christophe Dupouy, Chef étoilé des Clés d’Argent à Mont-de-Marsan : il rêve de pouvoir la mettre au menu. Même s’il lui arrive - pour varier les goûts et animer sa carte qui change tous les deux mois - de travailler du bœuf venu d’ailleurs - parfois de loin - Christophe Dupouy est à son Chalosse fermement attaché : "il a un gras très intéressant", explique-t-il, "qui suffit pour une belle cuisson".
La viande n’est commercialisée qu’en boucherie traditionnelle. Philippe Gaye, Maître artisan à Mont-de-Marsan - le seul de la ville à vendre du Chalosse - a commencé lors de la crise de la vache folle : "le Label Rouge et la proximité sont des gages de qualité qui inspirent confiance". Ils étaient jadis trois, dans les rues du Moun, il se retrouve aujourd’hui tout seul. Les carcasses qui se balancent dans sa chambre froide sont assurées d’être bientôt débitées d’un geste qui ne le sera pas moins : "la maturation donne à la viande un goût plus prononcé, elle lui permet d’exprimer son caractère". Le cahier des charges impose une maturation d’au moins dix jours pour les viandes à griller, quinze pour celles à bouillir et à braiser.

Jean Coussau, Chef deux étoiles du Relais de la Poste à Magescq est heureux de travailler avec des éleveurs passionnés : "le Chalosse donne une viande persillée, goûteuse et tendre d’une qualité extraordinaire" ! Il apprécie du produit sa traçabilité : "les bêtes, je sais tout d’elles, je les ai vues grandir". Le tournedos avec sa sauce aux truffes a remplacé à la carte du Relais le filet servi avec un ragoût de queue de bœuf, tandis qu’au très accessible Bistrot voisin, il y a du contre-filet au menu.
Le cahier des charges - toujours lui - impose que les six mois d’engraissement terminal - c’est lent, c’est long - se déroulent en Chalosse : la bête mange alors principalement du maïs récolté sur l’exploitation, son gras et son muscle se mélangent, sa viande se persille. Bruno Ducasse (un nom prédestiné pour faire de belles choses) est naisseur-éleveur-engraisseur à Mugron : il fait du Chalosse depuis toujours, comme papa, et ne changerait pour rien au Monde. Chalosse un jour ? Chalosse toujours !

La liste complète à jour des boucheries agréées se trouve sur le site de Qualité Landes : www.qualitelandes.com. Ils arborent sur leur vitrine le logo à corne rouge.


Textes & Photos : Pierre-Brice Lebrun pour La Gazette Gourmande

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